Ces objets sont tout simplement épatants. Des inventions humaines mêlant inventivité et sens du bien-être général. Mais il y a un truc énervant avec les sex-toys, un certain discours, une remarque qui revient sans cesse : « C’est un effet de mode, maintenant la femme moderne veut s’acheter un vibro-masseur ou un god, comme avant elle voulait se payer un nouveau sac à main ».

Comment peut-on réellement penser que les femmes achètent des gods par effet de mode, parce que ça fait chic ou libérée ? Pour ma part, je ne vois que deux explications à ça :
1/ n’avoir ni vagin ni clitoris ;
2/ n’avoir jamais testé un vibro.

Parce que, soyons honnêtes d’entrée de jeu, les sex-toys remplissent à merveille leur fonction. Ils sont même d’une efficacité redoutable (en règle générale, car évidemment il existe des produits défectueux). Or cette fonction masturbatoire semble un peu négligée par les tenants de « l’effet de mode » qui ne voient que des chiffres et non des pratiques de la vie quotidienne.

En quelques années, le créneau des sex-toys pour femmes est passé du néant à une juteuse entreprise

Niveau chiffres, il est vrai que c'est un marché en pleine expansion. En quelques années, le créneau des sex-toys pour femmes est passé du néant à une juteuse entreprise. Les fabricants et les vendeurs ont compris qu’il serait plus rentable de faire des boutiques dans lesquelles on n’a pas peur de se faire enlever pour être vendue comme esclave sexuelle et des gods qui ne ressemblent pas à des pénis morts. Autant d’éléments qui facilitent le passage à l’acte… d’achat.

Mais pourquoi ne pas se réjouir de la disparition des fameux appareils de massages que les catalogues par correspondance vendaient, illustrés par la photo d’une femme qui posait son vibro-masseur d’approximativement deux kilos sur le cou et affichait un sourire crispé ? De même, quand on voit les godemichets en os du XVIe siècle, on aurait tendance à remercier Fun Factory et Ledo d’avoir sorti le god de la préhistoire. Si les femmes n’ont pas attendu l’apparition des écoles de communication publicitaire et de marketing pour découvrir les joies de la masturbation, désormais la vente de ces objets se fait de façon plus décomplexée, elle s’affiche dans les quartiers chics des centres-villes. L'idée que c'est juste un effet de mode semble cacher un malaise vis-à-vis de la masturbation féminine. Peut-être parce qu’il est troublant de découvrir que des femmes peuvent avoir suffisamment envie de se masturber, de se donner du plaisir pur, pour y consacrer de l’argent. D’autant que le vibro-god est quand même un achat parfaitement égoïste – malgré les fréquentes dénégations des intéressées « non-non, c’est pour mon couple, avec mon partenaire », sauf que quand le partenaire n’est pas là, le sex-toy reste-t-il vraiment dans la table de nuit ?

C'est oublier qu’il y a des vibro-masseurs qui sont plus efficaces que tous les doigts du monde

Parler d’effet de mode, c’est exclure l’idée que la femme a une pulsion sexuelle à assouvir. Et en prime, ce qu’on retire de l’ordre de la pulsion sexuelle, on le met sur le compte de la victime facile de la mode et des magazines féminins. On peut répondre que techniquement, il n’y a pas besoin de vibro-masseur pour se masturber. Mais c’est oublier qu’il y a des vibro-masseurs qui sont plus efficaces que tous les doigts du monde. Comme quoi, il arrive à l’être l’humain de concevoir des objets qui marquent un réel progrès. Et même en-dehors de la comparaison qualitative, ce n’est tout simplement pas la même chose, ce ne sont pas les mêmes sensations, c'est à peu près aussi différent que le sexe seul et à deux. Quand une femme va s’acheter un vibro la première fois, c’est souvent par curiosité. Pour savoir ce que ça fait, si c’est bien. Pour certaines qui ont du mal à jouir, c’est aussi un moyen de se rassurer, de voir si leur corps fonctionne, de le découvrir…Quand elles franchissent le seuil de la boutique, la carte bleue à la main, il faudrait simplement les voir comme des femmes qui ne veulent pas se priver d’une source de plaisir.

Titiou Lecoq
Blogueuse