Baise in France


Les buts de l'enquête Contexte sexuel des Français (2e partie)


CSF, la sexualité en France : entretien avec Alain Giami (2e partie)

Deuxième partie de l'entretien avec Alain Giami sur les pratiques sexuelles des Français : les buts de l'enquête CSF et ses conclusions.

Les buts de cette enquête
Ils sont clairs : financée et commanditée en premier lieu par l'Agence nationale de recherches sur le Sida (ANRS), cette enquête cherche à analyser les comportements sexuels en fonction des prises de risque : usage ou non du préservatif, partenaires multiples, pratiques hétéro et homosexuelles contingentes, tout ça a été mesuré. Le CSF avoue même que « cette enquête devrait contribuer à guider l'élaboration des politiques de prévention de la transmission sexuelle de l'infection à VIH et des autres risques associés à la sexualité » comme ici l'infection à Chlamydia Trachomatis (CT). Cette IST (infection sexuellement transmissible) est souvent asymptomatique, beaucoup de personnes ignorent qu'ils sont porteurs de germes qui peuvent conduire vulgairement à une « chaude pisse » (garçon) et une urétrite, infection urinaire ou mycose (fille) et conduire à l'infertilité.
Comme elle se transmet en cas de rapports non protégés, les enquêteurs ont proposé aux sujets de l'enquête qui avouaient avoir plusieurs partenaires, une analyse sanguine. On obtient 3.5% des 18-45 ans porteurs du CT. Le CSF remarque : « A l'occasion de ce diagnostic, la proportion de personnes qui ont parlé de cette infection à leur partenaire sexuel est plus faible chez les hommes que chez les femmes. » Là on est dans l'écart de l'écart : que veut dire cette remarque ? Que les mecs mentent plus que les femmes ? On est impatient de lire la suite...


[Tableau 8 : Prévalence de l'infection à Chlamydia Trachomatis]

Des chiffres sans surprise
Au niveau des liens entre sexualités et niveau de vie, on ne découvre rien de surprenant : « l'épidémie affecte de plus en plus des populations précarisées socialement et économiquement » affirme le communiqué. Pas de surprise aussi pour l'âge avoué du premier rapport sexuel qui baisse à 17 ans et demi en moyenne pour les deux sexes. On doit bien fêter la sortie du lycée de toutes manières... Ou encore de la fréquence masturbatoire chez l'homme (90%) : on se souvient de cette blague dans les années 1950, 10% des garçons disent se masturber, 90% mentent ». Idem pour les femmes : Autant de résultats que Keynes avait déjà mis en lumière au début des années 1950.

Des femmes à la fois sexuellement plus active et dominées ?
L'enquête révèle que les femmes de plus de 50 ans ont une vie sexuelle plus riche et que l'homosexualité féminine augmente. En même temps, on peut s'interroger sur ce chiffre de 30% des femmes interrogées qui fonderaient leur vie de couple avec la personne avec laquelle elles ont connu une première expérience sexuelle autre que la masturbation. Giami rappelle « qu'en 1992, le chiffre approchait les 50%. Mais, poursuit-il, que veut dire « l'écart avec les hommes restent importants ? » : doit-on tendre vers une égalité absolue, une similarité des comportements hommes-femmes ? On a ici la nette impression que le point de vue énoncé ici est que tous les problèmes entre les sexes viennent du fait que les pratiques divergent ? Au niveau de toute une vie, les hommes, disent les chiffres, ont plus de partenaires que les femmes, mais au niveau des 12 derniers mois, ça s'équilibre. Conclusion : « les déclarations sur toute une vie sont normatives, relèvent des représentations de l'homme coureur et de la femme conjugale et amoureuse. Ça ne va pas plus loin. »


[Graphique 6 : Personnes ayant expérimenté au moins une fois dans leur vie les pratiques suivantes (en %)]

Conclusion : l'hétérogénéité des comportements
« Seulement 4.5% d'homosexuel(les) ! Etonnant ! Là encore, poursuit Alain Giami, ça ne veut rien dire, qu'il s'agit d'une moyenne sur la France : en Corrèze on trouve un taux ridicule, à Paris, on est proche des 10%. En clair, et si l'on regarde les chiffres des douzes derniers mois de rapports sexuels de l'échantillon, l'homosexualité « pure » (entre deux personnes de même sexe) est très peu fréquente. » Des chiffres qui n'ont rien à voir avec les représentations socioculturelles en France.

On a trois types de populations :
- celles et ceux qui ont une vie sexuelle fouillée (or ici pas ou peu de données sur les individus qui consacrent du temps à ça)
- celles et ceux qui ne vivent rien et qui n'en souffrent pas (15%)
- enfin, l'entre les deux (l'ensemble des données)

Donc, ce qui a lieu effectivement est impossible à mesurer, l'hétérogénéité des comportements est en réalité bien plus grande, car les chiffres rabotent les extrêmes.

Comment mesurer l'érotisation de la société ?
Pourquoi un tel écart entre la banalité des comportements observés et l'érotisation de la société ? Michel Bozon va lui jusqu'à affirmer « qu'il n'y a pas eu de révolution sexuelle ». Les statistiques permettent d'obtenir en principe des écarts, pour cadrer les choses : par exemple, la doxa dit que les couples baisent deux fois par semaine ? Alors ceux qui déclarent 20 fois par mois et considèrent ne pas baiser assez, ça nous renvoie bien à des questions sur la norme, non ? Autre exemple : un jour la chanteuse Lioavoua à la télé avoir eu 25 partenaires depuis son adolescence. Le journaliste lui rétorqua : « eh bien, vous en avez eu 7 fois plus que la moyenne des Français ! ». Voilà, en gros, elle passait pour une « salope »... Un dernier exemple : les couples présumés infertiles qui consultent des spécialistes déclarent au fil des consultations avoir eu quatre rapports par mois en moyenne, or ils sont censés pratiquer le coït... Où se situe donc dans ce cas « ce qui est » vraiment et « ce qui devrait être » ? »


[Graphique 2 : Nombre moyen de partenaires dans la vie en 1970 en 1992 et en 2006]

Et Alain Giami de conclure : « Comme je le rappelai en 1991 (in Sciences Sociales et Santé) : « C'est surtout le critère de définition du "sexuel" qui reste problématique.Alors que chez Kinsey l'utilisation du critère de l'orgasme a fait preuve de limites et de contradictions qui sont plus ou moins habilement contournées, on constate que d'autres critères plus ou moins extérieurs et plus ou moins associés à une hypothétique définition du sexuel sont mis en oeuvre depuis Simon, pour délimiter empiriquement le champ du "comportement sexuel" et que l'utilisation de ces critères tend à remodeler, à chaque fois, la sphère du "comportement sexuel". »

Propos recueillis et commentés par Philippe Di Folco le 4 avril 2007

* "Contexte de la sexualité en France" parue en mars 2007 (le communiqué au format PDF)

[illustration 'A la une' : extraits de la série de portraits No look, 2006-2007 du photographe Jean-Paul Four].

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